L’éducation sentimentale

Gustave Flaubert

Hugo poche

Partager sur :

Le pitch

Un jeune provincial de dix-huit ans séduisant et plein de rêves vient faire ses études à Paris. De 1840 à 1867, il découvre le monde qui hésite entre la monarchie, la république et l'empire à travers une société en pleine convulsion, Sur son chemin, il rencontre le grand amour, Marie Arnoux, épouse d'un riche marchand d'art, dont il est éperdument amoureux et les contingences du plaisir, la Révolution et ses faux apôtres, l'art, la puissance de l'argent et de la bêtise, la réversibilité des croyances, l'amitié fraternelle et la fatalité des trahisons.

C'est au contact de cette passion inactive et des contingences du monde qu'il fera son éducation sentimentale, qui se résumera pour l'essentiel à brûler, peu à peu, ses illusions.

Mon avis

Il n'y a pas à tortiller : lorsqu'on est un amoureux de la littérature, survient toujours dans son parcours de grand lecteur un moment où l'on réalise qu'on est - décidément - plus Flaubert que Stendhal... ou plus Stendhal que Flaubert.

Non que l'objectif soit de comparer systématiquement les auteurs pour les hiérarchiser : on ne hiérarchise pas l'art (quoique... quels sont vos trois compositeurs classiques préférés ? Moi, je peux répondre instantanément !).

En fait, le constat se fait naturellement, tant le style et l'intention des deux hommes les opposent.

Mon propos ici n'est pas d'approfondir et justifier cette position, c'est juste un fait : pour moi, pas une once de doute, Stendhal possède le génie, la "classe" stylistique que je ne vois nulle part chez Flaubert.

Tout ça pour vous expliquer pour quelle raison je reviens régulièrement sur les grands auteurs du XIX° : pour voir si mes goûts ont changé, si les œuvres ont changé (ok, je sais que ce n'est pas possible, mais je vérifie quand même), si les émotions que je ressens à relire les œuvres majeures sont toujours les mêmes.

Me revoilà donc récemment devant L'éducation sentimentale, le roman de Flaubert qui, durant mon adolescence, m'a sauvé de l'ennui profond provoqué par la lecture de Madame Bovary (je vous jure !), Salambô (si, si !) et Bouvard et Pécuchet (quelle purge !).

J'en gardais un souvenir diffus, d'où émergeaient un ressenti romantique puissant, et un témoignage historique passionnant (la révolution de 48 à Paris).

Comme quoi, le temps et les goûts changent : avec cette relecture, je dois bien admettre que L'éducation sentimentale s'est révélée bien inférieur à mon souvenir, mais tout de même assez remarquable... pour des raisons assez éloignées de celles évoquées plus haut !

Romantique, L'éducation sentimentale ? Surtout pas, ce roman est un tue l'amour, l'extrême inverse du Rouge et le noir !

Frédéric Moreau est un anti-héros parfait, jeune écervelé sans intérêt qui devient, au fil du temps, un vieil écervelé.

Passant sans arrêt à côté du grand amour, amoureux intellectuellement de l'idée qu'il se fait d'aimer une femme inaccessible, il tombe et sombre sans arrêt dans les pièges les plus évidents de la carte du tendre, dont il ne parvient pas à déchiffrer le moindre signe.

Face à lui, une anti-héroïne parfaite, cette Marie Arnoux que Flaubert décrit comme une femme hors du commun, mais dont il ne livre jamais la moindre clé pour expliquer cette assertion.

Jolie ? Oui, sans plus, on ne sait à quoi elle ressemble, en fait. Intelligente ? Certes pas !

Subtile en amour ? Pas du tout, elle a la maturité d'une jeune fille de quinze ans.

Passionnée ? Que nenni ! Comme un vieux poêle, il lui faut un temps fou pour s'échauffer et, même là, ça ne brûle pas bien fort !

Bref, L'éducation sentimentale n'est vraiment pas un roman romantique, ni un roman d'amour. Et tant que Flaubert s'attache à cet aspect de son récit, pendant près de 300 pages, je me suis surpris à m'ennuyer souvent, parfois gravement.

Quant au pan historique du roman, il surprend tant Flaubert évite en fait autant que possible le sujet en contournant presque systématiquement l'évocation des grandes scènes de la révolution.

Paradoxalement, c'est quand il s'attache à décrire le petit quotidien de l'époque, les réunions de quartier où débattent les parisiens, complètement largués par l'histoire qui est en train de se jouer devant eux, qu'il réussit le mieux son tableau.

Quel plaisir de voir Flaubert, par instant, quitter le sérieux qui le rend si pesant et peu intéressant, pour laisser aller son sens de l'observation humaine et - c'est vraiment étonnant - son sens de la satire !

Flaubert peint à merveille les ridicules, il croque à merveille - tel un Daumier romancier - les silhouettes ingrates et les esprits faibles.

C'est alors que L'éducation sentimentale décolle, et dévoile ce qu'aurait pu devenir Flaubert : un grand portraitiste de son temps.

 

Acheter sur Amazon

Du même auteur