Les proies

Thomas Cullinan

Rivages / Noir

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Le pitch

En pleine guerre de Sécession, un caporal nordiste échappe à un brasier et trouve refuge dans un pensionnat pour jeunes filles confédéré. Mais l'intrusion soudaine d'un mâle vient perturber la vie des huit femmes qu'abrite encore l'institution, huit recluses pétries de valeurs puritaines et de pulsions refoulées.

Objet de tous les fantasmes, le soldat va s'employer à.. les incarner avec un art consommé de la manipulation, jusqu'à une nuit où tout bascule.

Huis clos psychologique au suspense diabolique, ce roman sulfureux a été porté à l'écran une première fois en 1971 par Don Siegel, avec Clint Eastwood dans le rôle principal, puis par Sofia Coppola en 2017.

Mon avis

Ce roman publié en 1966 a été porté à deux reprises au cinéma, la première adaptation étant d'ailleurs un superbe film de Don Siegel relativement peu connu, à découvrir, et la seconde un film de Sofia Coppola qui a beaucoup fait parler de lui au festival de Cannes 2017.

Deux adaptations ? Pour quelle raison ? Très simple : l'idée dramatique développée par Thomas Cullinan est tout simplement formidable !

Imaginez : un huis-clos en pleine guerre de sécession dans un pensionnat de jeune filles situé dans le sud des Etats-Unis peuplées uniquement de... jeunes filles et de vieilles filles, dans lequel échoue un soldat sudiste blessé.

L'homme, recueilli et soigné par toutes ces femmes avec une touchante unanimité bien qu'il ne soit pas du bon bord, va, sans le moindre scrupule, utiliser toute la finesse de sa dialectique de filou pour manipuler le contenu de ce poulailler... à ses risques et péril.

Formidable idée et excellent développement du scénario, me suis-je dis au cours de ma lecture. Du moins... durant les deux ou trois cents premières pages.

Car il y a un hic : l'idée est délicieuse, le déroulé de l'histoire impeccable, mais l'auteur a tout simplement perdu toute mesure en écrivant son roman, s'enivrant dans d'innombrables scènes de dialogues interminables.

C'est bien simple : chaque chapitre (alternance de récit à la première personnage de chacun des huit personnages féminins) est carrément deux fois trop long ! Près de 700 pages serrées, pour une intrigue qui n'aurait pas dû dépasser les 400...

Développements inutiles, répétitions des idées, incapacité totale de l'auteur à laisser le lecteur comprendre par lui-même les pensées de ses personnages (chaque effet est souligné, expliqué lourdement).

Quel dommage : toute la finesse des manipulations psychologiques effectuées par le personnage principal sur ces huit spécimen de la gente féminine, toutes trop jeunes ou innocentes pour apercevoir les filets qu'il jette pour les capturer, est noyée dans cette logorrhée interminable !

J'ai rarement eu l'occasion de voir, littéralement, sous mes yeux, défiler aussi nettement les paragraphes à biffer, comme aurait dû le faire un bon éditeur, pour resserrer l'intrigue, donner un peu de rythme et de suspens à une histoire qui n'en a aucune !

Dommage, dommage, dois-je répéter...

Une belle idée, un cadre historique impeccable, un style très corseté habilement calé sur l'époque (les personnages parlent un peu comme ceux d'Autant en emporte le vent), quelques répliques particulièrement savoureuses et, malgré toutes ces qualités, l’œil qui glisse de plus en plus vite en travers des pages.

Pour les amateur(trice)s de thriller historique au rythme lent. Très lent.

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