Le pitch

" Toute ma vie, je me suis fait une certaine idée de la France. Le sentiment me l'inspire aussi bien que la raison. Ce qu'il y a, en moi, d'affectif imagine naturellement la France, telle la princesse des contes ou la madone aux fresques des murs, comme vouée à une destinée éminente et exceptionnelle. J'ai, d'instinct, l'impression que la Providence l'a créée pour des succès achevés ou des malheurs exemplaires. S'il advient que la médiocrité marque, pourtant, ses faits et gestes, j'en éprouve la sensation d'une absurde anomalie, imputable aux fautes des Français, non au génie de la patrie. Mais aussi, le côté positif de mon esprit me convainc que la France n'est réellement elle-même qu'au premier rang ; que, seules, de vastes entreprises sont susceptibles de compenser les ferments de dispersion que son peuple porte en lui-même ; que notre pays, tel qu'il est, parmi les autres, tels qu'ils sont, doit, sous peine de danger mortel, viser haut et se tenir droit. Bref, à mon sens, la France ne peut être la France sans la grandeur. " Charles de Gaulle

Mon avis

En 2020, nous aurons célébré les 80 ans de l'appel du 18 juin ainsi que les 50 ans (un demi-siècle déjà !) de la mort de Charles de Gaulle.

Comment ne pas en profiter pour signaler à ceux (nombreux) qui ne les ont pas lues, les mémoires du très grand homme, au sens propre (1 m 96) comme au sens figuré (plus le temps passe, plus l’histoire rend hommage à ses qualités d'homme d'état) ?

Et même si l'homme ne vous plait pas plus que ça, je ne peux que vous incitez - non : vous priez, vous suppliez ! - à vous lancer dans la lecture de ses Mémoires de guerre, pour l'amour de l'Histoire et de la littérature, car ce livre est tout simplement géant !

Dès l'incipit (voir le pitch) immensément célèbre, le lecteur se prend une grande révélation dans la figure : de Gaulle écrivain avait un style magnifique, exceptionnel !

Cette constatation initiale, c'est celle que vous ne ferez que répéter tout au long des 1 500 pages denses de cet exercice mémoriel que vous pourrez trouvez sous la forme d'un très gros volume (avec les Mémoires d'espoir en prime) ou en trois épais recueils en format poche : de Gaulle, quelle sacré plume, nom d'un chien !

Régulièrement, j'ai interrompu ma lecture, pour le simple plaisir de revenir sur un paragraphe et de le relire, tant l'élégance du propos et de sa formulation me titillait agréablement les méninges...

Au delà de ses qualités littéraires, la seconde raison qui doit vous inciter à découvrir cet ouvrage marquant, est qu'il s'agit d'un des livres d'histoire les plus passionnants qu'il m'ait été donné de lire au  long de ma vie de lecteur compulsif.

Passionnant, parce que de Gaulle vous prend la main pour vous guider, jour après jour, sur les chemins de la grande histoire, mais aussi dans les coulisses de la "petite", celle qui court sur plus de deux mille jours, entre la débâcle, et la victoire.

Le tout avec une clarté d'exposition, une précision dans les détails qu'ont pu applaudir tous les historiens de profession, tant de Gaulle joue avec habileté et opportunité avec la focale de sa caméra, zoomant quand cela est nécessaire ou, au contraire, prenant du champ pour remettre un fait, une remarque, dans son contexte global.

Passionnant, également, car l'auteur était un conteur né, capable de mener le lecteur par le bout du nez, page après page. Croyez-moi, vous ne vous ennuierez pas une seconde, tant ces Mémoires de guerre sont un vrai Tourne Page !

Fascinant, enfin, tant la volonté et l'intelligence du narrateur brille à chaque page. Subtilité de l'analyse, sens de la formule (quel esprit mordant !), sens de l'Histoire...

Bref, vous l'avez compris, ce document au long cours est un chef-d'oeuvre à placer dans toute bibliothèque idéale.

Pour apprendre, comprendre, et se souvenir.

Mais comme personne n'est parfait, je terminerai ce panégyrique par une remarque : Charles de Gaulle était un être exceptionnel, à tout point de vue, mais son moindre défaut était de le savoir, et de la faire savoir !

Impossible de ne pas rire, à plusieurs reprises, lorsque le grand homme parle de lui à la troisième personne, traçant lui-même dans l'histoire du XX° siècle le portait de Charles de Gaulle, visionnaire et leader charismatique.

Comme quoi, on n'est jamais mieux servi que par soit même !