Cartel

Don Winslow

Seuil / Points

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Le pitch

2004. Adan Barrera, incarnation romanesque d'El Chapo, ronge son frein dans une prison fédérale de Californie, tandis qu'Art Keller, l'ex-agent de la DEA qui a causé sa chute, veille sur les abeilles dans un monastère.

Quand Barrera s'échappe, reprend les affaires en main et met la tête de Keller à prix, la CIA et les Mexicains sortent l'Américain de sa retraite : lui seul connaît intimement le fugitif.

La guerre de la drogue reprend de plus belle entre les différentes organisations, brillamment orchestrée par Barrera qui tire toutes les ficelles : la police, l'armée et jusqu'aux plus hauts fonctionnaires mexicains sont à sa solde. Alors que la lutte pour le contrôle de tous les cartels fait rage, avec une violence inouïe, Art Keller s'emploie à abattre son ennemi de toujours.

Jusqu'où ira cette vendetta ?

Mon avis

Faisons simple et direct : Cartel, c'est la suite directe de La griffe du chien, l'extraordinaire thriller américano-mexicain de Don Winslow.

Porté par le succès international - amplement mérité ! - de cet énorme roman décrivant les longues années de la lutte des américains contre les filières mexicaines de la drogue qui, il y a une génération, noyaient les U.S. sous des déluges de drogue, l'auteur s'est cru obligé (l'attrait financier, sans doute ?) de réouvrir le récit, de nombreuses années plus tard, en reprenant la narration de la lutte à mort des deux personnages principaux.

Deux personnages, ou plutôt deux survivants des massacres de La griffe du chien : le "gentil" (mais impitoyable) Art Keller, agent de la DEA, et le très très "méchant" Adan Barrera, le leader des filières mexicaines destitué et incarcéré à la fin du premier volume.

Donner une suite à une réussite absolue, c'est une gageure.. et un énorme risque, car tous les lecteurs qui ont adoré le premier roman vont se précipiter sur le second en espérant y retrouver tout le plaisir de leur première lecture.

Avec Cartel, le fan de La griffe du chien  subit un douloureux ascenseur émotionnel.

En plus de 700 pages (version brochée) et presque 900 pages (version poche), il commence par retrouver avec une satisfaction indicible la narration impeccable de Don Winslow.

Maître absolu du thriller du XXI° siècle, l'auteur balade son public avec une maestria époustouflante : des situations formidablement bien campées, documentées, portées par un style direct, coup de poing, des phrases courtes, des dialogues rythmés, des "chutes" presque à chaque fin de paragraphe où, en autant de minuscules twists, il assène en un retour à la ligne diabolique une révélation, en quelques mots.

Dès le départ, le lecteur de La griffe du chien sait que l'histoire va être terrible, sanglante, horrible.

Donc, pas de surprise : on frémit, on plisse les yeux d'horreur devant les descriptions très complaisantes des massacres opérées par les différents cartels mexicains se disputant les filières et les territoires.

Tout cela est presque aussi prenant que dans le premier roman, même si l'étonnement de la nouveauté a disparu, et même si la trame scénaristique manque un peu de subtilité.

Batailles entre les gouvernements et les trafiquants ? OK.

Batailles entre les différents trafiquants ? OK.

Bataille entre les honnêtes et les corrompus, au sein même de la police et de l'armée ? OK.

Mais à part cela... pas grand chose.

Puis, au fil des pages, des centaines de pages (!), l'ascenseur redescend, progressivement au début, pour finir en chute libre.

Car franchement, passée la première moitié - et encore plus les deux premiers tiers du livre - l’histoire, répétitive, tourne franche en rond !

Massacres répétés (des centaines de morts !) , des tortures, tueries racontées par l'auteur avec une jouissance extrêmement gênante.

On a la nausée. Et ce n'est pas l'intrigue, très téléphonée et sans renouvellement qui compense ce dégoût.

Pour être franc, j'ai passé les deux cents dernières pages à "l’œil laser" (vous savez, celui qui zappe les pages à la recherche des mots importants) pour finir par échouer sur un dernier chapitre... qui se termine de manière tout à fait prévisible.

Quel dommage ! 200 pages écartées, un brin de sang et de cervelle en moins, et j'aurais adoré. Mais là, trop c'est trop !

Au total : un roman bancal et et une déception finale qui gâche tout le plaisir de ces retrouvailles.

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