Les vierges

et autres nouvelles

Irène Némirovsky

Denoël / Folio

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Le pitch

Rarement l'ironie d'Irène Némirovsky aura fait autant de ravages ! Fils et filles hantés par leur hérédité côtoient des hommes brusquement dépouillés de leurs atouts, des femmes abîmées dans le regret, des maris jaloux ou amers. Et pourtant, si fragile que soit le sort de ces personnages, un fil les relie à la vie.

Il court d'un bout à l'autre de ces douze nouvelles, où Irène Némirovsky emprunte des chemins nouveaux, du scénario aux histoires de fantômes. Jusqu'à ce dernier et éblouissant récit, Les vierges, publié en 1942 avant qu'elle ne soit déportée à Auschwitz, et ce cri poussé par Camille : " Je suis seule comme vous à présent, mais non pas d'une solitude choisie, recherchée, mais de la pire solitude, humiliée, amère, celle de l'abandon, de la trahison."

Mon avis

Publié en 2009 chez Denoël, "grâce" au succès critique et commercial foudroyant de Suite française, le superbe roman inachevé d'Irène Némirovsky publié 60 ans après sa mort à Auschwitz, en 1942, Les vierges est un recueil de nouvelles aux thèmes et aux formes extrêmement variées.

Douze nouvelles pour 250 pages, de Film parlé, qui en compte près de 70, jusqu'à Les vierges, qui ne dépasse pas la vingtaine, en passant par Echo, qui ne fait que six pages : l'échantillon des talents d'Irène Némirovsky est extrêmement complet.

Certaines nouvelles sont très réalistes (et parfois un peu datées entre-deux guerre), d'autres appartiennent au fantastique.

Les vierges, la nouvelle qui donne son titre au recueil, est un rappel des qualités stylistiques de l'auteure, d'un classicisme absolu : quelle belle langue, simple, précise et pourtant souvent poétique !

Cette maîtrise parfaite mérite à elle seule l'achat de ce recueil pour ceux qui n'ont pas (encore) eu le plaisir et la chance de lire Suite française, même si le thème de ce court récit manque sans doute un peu d'originalité.

Mais la nouvelle qui justifie le détour, c'est bien Film parlé.

Loin de son mode d'expression habituel, il s'agit d'un essai stylistique tout à fait fascinant, tant il apparaît en avance sur son époque.

Film parlé c'est, comme son nom l'indique parfaitement, une tentative de mettre un script de film en prose.

Vous ne voyez pas ce que je veux dire ?  Pour bien comprendre, il faudrait que je reproduise ici au moins une demi-page de texte, ce qui n'est pas l'objet de cette chronique.

Imaginez simplement que la narratrice déroule sa prose, comme si elle racontait le film qui est en train de défiler devant ses yeux sur un écran.

Elle raconte l'histoire, elle insère les dialogues des personnages, mais elle écrit aussi précisément ce qu'elle voit, les mouvements de caméra, les travellings, les coupes, le montage des images.

Procédé extrêmement original pour un texte écrit en 1940, il ne peut que fasciner le lecteur.

En fait, il fonctionne mieux que les essais, vingt ans plus tard, des auteurs du nouveau roman qui se sont essayés à l'exercice !

Sans doute parce qu'Irène Némirovsky avait un talent littéraire que ceux-ci n'avaient pas...

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