Mes problèmes avec les femmes
Cornélius
Mes problèmes avec les femmes
Cornélius
Le pitch
Au détour d'une histoire de Mes Femmes, Crumb livre au lecteur sa vision du bonheur : une vieille maison de bois avec un porche à l'ancienne, où s'asseoir en famille pour gratter du banjo. Ni vin, ni drogue, ni danse, mais l'ambiance d'un tableau de Grant Wood et l'illusion du retour à l'Amérique agraire, frugale et modeste que rêvaient les pèlerins du Mayflower.
La culpabilité de ce puritain convaincu de la bestialité du sexe s'exacerbe au contact du San Francisco des années 60 et le pousse à battre sa coulpe à tour de bras. Pour mieux nous persuader de sa dépravation, Crumb dresse le catalogue scrupuleux de ses perversions, mise en scène des fantaisies masturbatoires d'un gringalet blanc, qui assouvit sa misogynie et apaise ses frustrations en dominant juives callipyges et négresses stéatopyges.
Comme il se doit, la confession précède l'absolution. Devenu pèlerin exemplaire, le dessinateur choisit la route de la rédemption qui passe par le travail et la famille. Et il ne reste plus à Robert Crumb, l'artiste fameux, l'époux aimant et le papa gâteau, qu'à rendre grâce de tant de bienfaits aux dieux qui lui ont épargné le destin de Don Juan, précipité dans les flammes de l'enfer, ou de Sante Kalzone, l'érotomane de La Cita Delle Donne, assiégé par les féministes en fureur.
Mon avis
Robert Crumb, c'est le pape de la BD underground US, le vétéran du politiquement incorrect, l'homme qui, pour aux moins deux générations d'américains, restera l'auteur de Fritz the cat, ce matou hyper-sexué qui scandalisa le pays au détour des années 60.
Un quart de siècle plus tard, maintenant que l'auteur a pris du recul par rapport à la BD, que reste-t-il de son oeuvre ?
C'est ce que je voulais vérifier en découvrant ce recueil d'une petite dizaine de strips comics publiés entre 1982 et 1995, alors que Crumb était au sommet de sa gloire.
Un recueil autour d'un thème majeur pour ce vieil obsédé sexuel : les femmes !
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Eh bien... rien n'a changé. Crumb restera toujours Crumb.
L'homme qui ne pense qu'à ça, ses femmes Junon au physique plus que plantureux, callipyges, fesses énormes, cuisses d'athlètes est-allemande des années 60, mollets hyper musclés...
Dans ces scènes où l'auteur se met en scène - personnage principal - sans aucune concession, tant sur le plan du trait (il est vraiment moche) que sur le plan psychologique (il est vraiment borné et bourrin), le lecteur (adulte : je précise !), estomaqué par tant de franchise, parcourt d'un œil plus ou moins libidineux (suivant ses préférences sexuelles !) les courbes sensuelles de ses proies.
Fin de la phrase interminable.*
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J'avoue que ces débordements psychanalytiques (car c'est bien cela dont il s'agit) ne sont pas vraiment ma tasse de thé, même s'il l'ensemble baigne dans un humour potache souvent très réussi (Crumb n'a jamais dépassé l'âge mental de quatorze ans, je pense...) .
Par contre, impossible de ne pas admirer le trait égal à lui-même de l'artiste dessinateur : Crumb a inventé un style à lui tout seul, un dessin crobardé mais hyper technique et précis, passé à la plume.
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Que du noir et blanc, en reliefs exacerbés par des hachures nerveuses omniprésentes.
Crumb restera, dans l'histoire des comics, comme l'inspirateur de centaines de dessinateurs qui l'ont par la suite plus ou moins habillement imité.
Rien que pour cela, l'album mérite le coup d’œil.
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