Temps noirs

Thomas Mullen

Rivages/noir

Partager sur :

Le pitch

L'officier Denny Rakestraw et les « officiers nègres » Lucius Boggs et Tommy Smith ont du pain sur la planche dans un Atlanta surpeuplé et en pleine mutation. Nous sommes en 1950 et les tensions raciales sont légion alors que des familles noires, y compris la sœur de Smith, commencent à s’installer dans des quartiers autrefois entièrement blancs.

Lorsque le beau-frère de Rake lance un projet visant à rallier le Ku Klux Klan à la « sauvegarde » de son quartier, les conséquences deviennent incontrôlables, forçant Rake à choisir entre la loyauté envers sa famille et la loi. Parallèlement, Boggs et Smith tentent d’arrêter l’approvisionnement en drogues sur leur territoire, se retrouvant face à des ennemis plus puissants que prévu : flics et ex-détenus corrompus, chemises noires nazies et voyou

Mon avis

En 2016, Thomas Cullen crée un petit évènement dans le microcosme du roman policier haut de gamme en publiant Darktown.

La raison ? L'utilisation d'une toile de fond historique quasiment méconnue jusqu'alors, l'introduction en 1948 d'une brigade de policiers noirs dans les forces municipales d'Atlanta, cette terre traditionnelle d'un racisme ordinaire qui ne veut pas disparaitre malgré les très lentes avancées de leurs droits civiques.

Darktown est une réussite remarquable (voir ma critique ailleurs le site), tant Thomas Cullen parvient à inscrire la lutte de cette dizaine d'hommes courageux dans une trame polar de qualité. La description de la lutte au quotidien des deux personnages principaux, Boggs et Smith, pour exercer leur métier et préserver leur intégrité physique est fascinante.

Le succès de Darktown a été tel que l'auteur en a repris le cadre et les héros pour le second volume de ce qui se révélera finalement être une trilogie.

Deux ans se sont écoulés depuis les premiers évènements et les problèmes de ségrégation ne se sont pas améliorés, loin de là, car les forces réactionnaires réagissent de plus en plus violemment, au fur et à mesure que la population noire croit et s'étend dans Atlanta, menaçant l'intégrité territoriale des quartiers blancs.

Le lecteur découvre alors, effaré, que dans ce contexte d'exaspération, les fanatiques du Ku Kux Klan se révèlent être quasiment des enfants de cœur, à côté des milices néonazies qui préemptent le terrain de la lutte raciale.

Avec une grande dextérité scénaristique, Thomas Mullen mêle plusieurs arcs narratifs où se croisent et s'évitent les policiers noirs, les policiers blancs souvent totalement corrompus par une pègre anti prohibition, les milices d'extrêmes droite, mais aussi les habitants blancs des quartiers où, peu à peu, la petite bourgeoisie noire vient s'installer.

Les tensions sont multiples, les morts s'accumulent... Jamais le titre d'un roman n'aura été mieux choisi : 1950, à Atlanta, ce sont des temps noirs pour toute une partie de la population.

Presque aussi réussi que Darktown, Temps noirs m'a semblé cependant se situer un brin en dessous, car Mullen a visé haut, très haut, et la trame des plus de 500 pages de son thriller est parfois si riche que l'on peut se sentir à certains moments un peu largué par la quantité de personnages et d'intrigues secondaires.

Quoiqu'il en soit, j'attends avec impatience que Minuit à Atalanta, le dernier volet de la trilogie, soit accessible en format poche pour me jeter dessus !

Du polar littéraire de haut niveau, que ne renieraient pas les glorieux ainés Dennis Lehane ou James Ellroy.

   

Acheter sur Amazon

Du même auteur