Chien 51

Laurent Gaudé

Actes Sud

Partager sur :

Le pitch

C’est dans une salle sombre, au troisième étage d’une boîte de nuit fréquentée du quartier RedQ, que Zem Sparak passe la plupart de ses nuits. Là, grâce aux visions que lui procure la technologie Okios, aussi addictive que l’opium, il peut enfin retrouver l’Athènes de sa jeunesse. Mais il y a bien longtemps que son pays n’existe plus. Désormais expatrié, Zem n’est plus qu’un vulgaire “chien”, un policier déclassé fouillant la zone 3 de Magnapole sous les pluies acides et la chaleur écrasante.

Un matin, dans ce quartier abandonné à sa misère, un corps retrouvé ouvert le long du sternum va rompre le renoncement dans lequel Zem s’est depuis longtemps retranché. Placé sous la tutelle d’une ambitieuse inspectrice de la zone 2, il se lance dans une longue investi­gation. Quelque part, il le sait, une vérité subsiste. Mais partout, chez GoldTex, puissant consortium qui assujettit les pays en faillite, règnent le cynisme et la violence. Pourtant, bien avant que tout ne meure, Zem a connu en Grèce l’urgence de la révolte et l’espérance d’un avenir sans compromis. Il a aimé. Et trahi.

Mon avis

Quand on est un admirateur quasi inconditionnel d'un auteur, il est toujours difficile d'être confronté, un jour, à ses faiblesses.

C'est ce qui vient de m'arriver avec Chien 51, le roman de Laurent Gaudé, cet auteur formidable qui, depuis vingt ans, permet à la littérature française de conserver ses lettres de noblesse.

De Gaudé, j'admire avant tout le style.

D'un grand classicisme formel, il est l'expression d'une pensée précise, poétique, d'une maîtrise étonnante des grands mythes fondateurs des civilisations humaines.

Mais de Laurent Gaudé, il faut admirer tout autant les sources d'inspiration et cette volonté de placer toutes les faiblesses de l'homme - et dieu sait si elles sont nombreuses ! - dans un contexte d'éternité qui lui permet de se transcender.

Avec Chien 51, le lecteur fidèle retrouve le style et les sources d'inspiration. C'est ce qui permet de lire avec un plaisir "gaudéen" la première moitié du roman.

Mais, par la suite, les faiblesses structurelles du projet ressortent, de plus en plus, pour un final nihiliste qui m'a laissé pantois. Je n'ai tout simplement pas compris où voulait en venir l'auteur.

Qui trop embrasse, mal étreint.

Gaudé a voulu se lancer dans un récit de science-fiction, ce qu'il n'avait jamais fait jusque là, avec une trame policière, ce qu'il n'avait jamais fait non plus; tout en mettant en avant ses thèmes habituels.

Cela fait beaucoup à caser en 270 pages.

Résultat : la trame SF, malgré quelques bonnes idées, exploite principalement des projections dystopiques déjà exploitées jusqu'à la trame avec talent par le passé par de grands auteurs spécialisés.

Cette toile de fond futuriste, faute de développements, de détails, de points d'encrage, manque de réalisme pour convaincre et immerger le lecteur.

Le récit policier, lui, est franchement sans grand intérêt, parfois confus, le style de Gaudé ne se prêtant guère à un tel exercice.

La faute en partie, sans doute, à un personnage principal, Zem Sparak, trop archétypal du genre (le solitaire mutique portant ses traumatismes du passé).

Résultat des courses : bien que parfaitement lisible, Chien 51 est un récit qui ressemble un peu trop à un exercice de style pour convaincre jusqu'au bout.  

Acheter sur Amazon

Du même auteur