Mildred Pierce

James M. Cain

Gallimard

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Le pitch

Mildred Pierce, petite femme aux cheveux blonds mousseux et aux yeux bleus limpides, décide de se séparer de son mari ; c'est, dit-elle, parce qu'il court après une certaine Mrs. Biederhof, mais surtout parce que, victime de la crise de 1929, il est sans travail et en prend trop aisément son parti.

Elle doit pourtant gagner sa vie, et celle de ses filles, alors, pour s'en sortir, elle vend les «pies» fait maison, et travaille comme serveuse dans un restaurant. Mais cela ne suffit pas, du moins pas aux yeux de sa fille aînée, Véda, alors Mildred se lance dans les affaires et ouvre son propre restaurant «Mildred Pierce, Poulet - Gaufres - Pies»...

Mon avis

Octobre 1929 : krach boursier à Wall Street, suivi d' une terrible dépression économique qui touchera profondément le tissu social et économique des Etats-Unis jusqu'à la seconde guerre mondiale.

1939 : John Steinbeck publie Les raisins de la colère. 1941 : James M. Cain publie Mildred Pierce.

Deux romans qui n'ont apparemment rien à voir, mais qui représentent en fait les deux facettes de l'impact de la crise de 1929 sur les américains.

D'un côté, les agriculteurs, les "damnés de la terre". De l'autre, les commerçants, les petits métiers de service (personnel de maison, serveuses) qui habitent les banlieues américaines.

Si le roman de Cain n'a pas eu le destin et la renommée mondiale du chef-d'œuvre de Steinbeck, il est temps de redonner l'importance que Mildred Pierce mérite au sein de l’histoire de la littérature américaine.

Au delà de la peinture sociale que présente Mildred Pierce, il y a la figure magnifique d'une femme entre deux mondes, courageuse, intelligente, profondément moderne dans sa manière de concevoir le destin d'une femme dans le monde d'après la crise.

Mildred Pierce décrit avec une précision entomologique les quelques années au cours desquelles l'héroïne va tenter de sortir de sa condition pour élever dignement ses filles.

Malgré les hommes qui, systématiquement, vont plomber son existence (on peut même dire : la saboter).

Et malgré sa fille aînée, un personnage absolument étonnant dans la littérature de l'époque qui, très rarement, donne le mauvais rôle aux femmes. Véda est une vraie méchante, une figure maléfique, terrifiante, car elle s'attaque à l'être qui devrait lui être la plus chère : sa propre mère.

Mildred Pierce est passionnant de bout en bout - un vrai Tourne Page ! - car la plume et la narration de James M. Cain sont d'une grande efficacité, un style proche du nouveau journalisme que n'aurait pas renié Tom Wolfe trente ans plus tard.

Cain aime son personnage, malgré ses défauts, ses faiblesses, et c'est cette empathie qu'il parvient à transmettre à ses lecteurs, au point qu'on ne peut suivre les péripéties de l'histoire qu'avec une grande émotion (que l'on retrouve dans l'adaptation remarquable qui en a été faite à l'écran il y a quelque temps, Kate Winslet incarnant à merveille l'héroïne).

C'est la marque d'un grand roman.

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