En terre étrangère

Robert A. Heinlein

Le livre de poche

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Le pitch

Né sur Mars, Valentine Michaël Smith est retrouvé par une expédition de secours venue de la Terre : tous les membres de l'expédition ont péri et Valentine a été recueilli et élevé par les Martiens, ces curieux êtres qui peuplent la planète rouge.

Smith est ramené sur Terre mais il rencontre les pires difficultés à s'intégrer dans notre société. Son apparence est humaine mais son esprit est martien.

Protégé par un écrivain célèbre et pittoresque, Jubal Harshaw, Smith réussira enfin à comprendre la place qu'il occupera sur la Terre, celle du nouveau Messie, rien de moins...

Mon avis

Comme j'ai pu l'écrire par ailleurs sur ce site, pour les vrais amateurs de SF, ceux qui bourlinguent depuis des années entre les romans du genre inventé il y a désormais plus d'un siècle par H.G. Wells et Jules VerneRobert A. Heinlein est une référence.

Sans doute un des trois piliers du mouvement hard science, en compagnie d'Isaac Asimov et d'Arthur C. Clarke.

Avec 4 prix Hugo en onze ans, entre 1956 et 1967. Rien que ça.

Et, parmi tous ses romans, tous ses succès, c'est sans conteste En terre étrangère, publié en 1961, qui est à ce jour considéré comme son chef-d'oeuvre, l'acmé de sa carrière.

Lu alors que j'avais une quinzaine d'années, le roman m'avait laissé une impression très favorable et, bien qu'assez confuse avec le recul, assez troublante.

Relu de nombreuses années plus tard (n'insistez pas, je ne donnerai pas de chiffres !), il m'a bien fallu admettre que, parfois, comme nous, pauvres humains, certains livres vieillissent.

Bien.

Mais vieillissent.

Le roman est en fait assez étrange.

Un très gros pavé (près de 800 pages très denses) clairement - mais non formellement - découpé en deux parties d'une longueur quasiment égale.

La première, typique du style et de l'humour caustique d'Heinlein, est une vaste revue abrasive des maux de l'Amérique moderne : pouvoir politique, médias, rapports entre les hommes et les femmes (nous sommes en 1961, rappelez-vous...), racismes de tout genre, religion...

Heinlein passe tout à la moulinette en usant du prétexte "SF", l'être venu d'ailleurs (un terrien devenu martien, je ne vous fais pas un dessin) n'étant qu'un prétexte déclencheur à ce scan ravageur.

Jubal Harshaw est le personnage central de ces 400 premières pages. Un humain vraiment humain, vieil homme aux capacités étonnantes. Le plus grand tchatcheur du siècle, indubitablement.

Cette première moitié est franchement bizarre car l'usage de dialogues incessants, prenant le pas sur la narration, est vraiment spécial.

Pour ma part, sa lecture fut un grand plaisir, tant j'y ai retrouvé les grands traits d'un certain cinéma des années 30 et 40 , ce que l'on appelait les screwball comedies.

La seconde moitié du roman use et abuse également des dialogues, mais son contenu a terriblement vieilli même si, paradoxalement, c'est lui qui permettra au texte de rentrer dans l'histoire.

Explication: ces pages sont sans doute un des accélérateurs principaux de la libération sexuelle aux Etats-Unis mais surtout le signe précurseur du mouvement power flower aux U.S. et dans le monde.

C'est un texte véritablement visionnaire qu'à proposé alors l'auteur, fascinant, choquant toute une génération d'américains.

Mais ces pages ont aujourd'hui perdu toute la force de leur transgression, puisque l'évolution du monde s'est clairement inspiré de ce qu'avait imaginé Heinlein en matière de révolution sexuelle et de développement des sectes religieuses et identitaires : c'est en cela que le livre a beaucoup vieilli (sans parler de sa vision de la femme, terriblement machiste, sexiste, et typique des années 50).

Bilan de la revisite tardive du roman : une salve d'applaudissements pour l'esprit caustique, le brillant des dialogues, pour l'aspect prophétique des développements.

Rien que pour cela, il faut avoir lu En terre étrangère.

Mais quelques réticences à la lecture de la seconde partie qui génère une impression de post-déjà vu : un peu comme lorsque vous regardez aujourd'hui un film de SF des années 80 qui est supposé se dérouler dans un futur lointain, mais où les téléphones ont des fils, les ordinateurs sont énormes et les écrans cathodiques gigantesques.

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